Monde : le Street Art contre l’esclavage

Par Michel Fily, le 28 novembre 2017

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Les images ont fait le tour du monde. En Libye, la traite d’êtres humains, que l’on aurait pu naïvement croire abolie, sévit de nouveau. Dénoncés aujourd’hui par les dirigeants occidentaux et africains, les viols, les tortures et l’esclavage de milliers de migrants en Libye étaient pourtant connus de longue date, soulignent ONG et analystes qui tirent la sonnette d’alarme depuis des mois. « Ça ne peut plus durer. Devant un crime contre l’humanité, on ne s’indigne pas, on réagit », a plaidé une de leurs représentantes. Malheureusement, ce crime contre l’humanité ne frappe pas que les migrants africains en Libye. D’autres formes d’esclavage sexuel, infantile, existent encore au 21e siècle, dans les pays occidentaux comme en Afrique et en Orient.

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Les artistes de rue sont des artistes engagés par nature et nombre d’entre eux se sont engagés depuis longtemps dans la lutte contre l’esclavage. Le fondateur de ce mouvement artistique Banksy est l’un des premiers à l’avoir fait, avec l’une de ses oeuvres les plus célèbres, « Slave Labour », peinte à Londres en 2012. Cette peinture murale de 3 mètres de haut et 1,52 mètre de large, peinte au pochoir en noir et blanc, représente un enfant, agenouillé pieds nus devant une machine à coudre. Il fabrique à la chaîne une banderole de drapeaux britanniques. L’oeuvre semblerait avoir fait référence à la découverte en 2010 d’un enfant de sept ans travaillant dans un atelier en Inde pour fabriquer des produits vendus par une chaine de magasins britanniques.

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En 2007, une installation à Trafalgar Square à Londres a tenté de sensibiliser le public au trafic sexuel au Royaume-Uni. La fresque, intitulée « Journey », présentait sept containers tagués par le Street Artist MODE2, retraçant le qui retracent le parcours d’une femme depuis sa maison en Europe de l’Est jusqu’en Angleterre, où elle finissait asservie par le trafic sexuel. Le projet était au bénéfice de la Fondation Helen Bamber, une organisation caritative basée à Londres qui oeuvre pour réhabiliter des personnes qui ont subi des violations flagrantes des droits de l’Homme. L’Angleterre est considérée comme la capitale de l’esclavage sexuel en Europe. L’installation « Journay » a voyagé dans plusieurs villes britanniques, puis s’est exportée dans toute l’Europe, y compris de nombreuses villes d’Europe de l’Est.

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En 2009, la Street Artiste parisienne d’origine guadeloupéenne Yseult Digan, alias Yz, initiait un projet très personnel baptisé « Back to the roots », autour de la culture, de la tradition et de l’histoire de la Guadeloupe, mais aussi autour de ses blessures. Sans artifice, elle a peint, collé et bombé des portraits percutants qui font sens dans la lutte contre l’esclavage et pour les droits civiques.

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En mars 2010, alors que le cinéma parisien le Louxor est en restauration, le dessinateur et graffeur Bilal Berren, alias Zoo Project, s’emparait de la palissade de protection du chantier pour y réaliser une grande allégorie de l’esclavage, représenté par cinq personnages accroupis, décapités, avec une chaine sortant de leurs cous et le reliant entre eux pour aboutir à une seule tête à son extrémité. Bilal Berreni est décédé en juillet 2013. Initié par sa famille, ses amis et ses collaborateurs, un vaste hommage lui sera rendu au printemps 2018, avec la publication de huit ouvrages retraçant le travail de Zoo Project, la sortie d’un film et de nombreuses expositions.

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À la Guadeloupe, aux Abymes, une oeuvre collective de 150 mètres de long a été réalisée en 2012 par des artistes locaux sur le thème des « pans d’histoire de la Guadeloupe sur l’esclavage et les abolitions“. Elle rappelle la mémoire de certains héros connus de la lutte contre l’esclavage, mais représente aussi les esclaves anonymes dans leurs souffrances. Des mots – « honneur », « résistants » -, des textes figurent sur cette fresque :  » Nos aïeux ont subi les pires outrages, nous permettant d’exister. Ils sont nos héros ».

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En Martinique, le collectif de graffeurs Mada Paint (NPL) – avec les signatures de Oshea, Nuxuno Xän, Moksa, R-Man, Thomas Braillon alias Wiltho… – s’est engagé contre l’esclavage sur une grande fresque peinte dans le port de Fort-de-France, représentant un homme noir brisant ses chaines, reliées à des barreaux derrière lesquels sont emprisonnés d’autres hommes. Au dessus de sa tête, son cri : « Libètéee ».

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Au Village Underground de Londres, en 2012, le projet « Follow Your Art – Street Art Against Slavery » a vu le jour, sous l’impulsion de l’organisation Anti-Slavery International (ASI) pour produire deux années durant, un événement exclusif d’art de rue et de musique pour lutter contre l’esclavage mondial. Les artistes de rue les plus influents de Londres y ont pris part : Kid Acne, Blade, Jimmy C., Conor Harrington, DOTS, Dscreet, Eine, Ron English, James Jessop, Anthony Lister, Dabs n Myla, Benjamin Murphy, Olek, Os Gemeos, Jo Peel, Mr Penfold, Remi Rough, Rowdy, RYCA, Matt Small, Sweet Toof, Miss Van, David Walker… Anti-Slavery International, fondée en 1839, est la plus ancienne organisation internationale de défense des droits de l’homme. Elle travaille à éradiquer l’esclavage à la fois dans ce pays et dans le monde entier. « L’art de la rue a la capacité de s’engager, de défier et de communiquer de manière directe et dynamique, et j’espère qu’une compréhension plus large sera acquise grâce à cette exposition, apportant un soutien supplémentaire au travail et à la cause d’ASI », avait déclaré le graffeur Jimmy C.

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Le 27 novembre 2016, une grande fresque en mémoire des victimes de l’esclavage a été inaugurée, à Sarcelles. Elle s’inscrivait dans le projet national d’art urbain « 100 murs pour la jeunesse » et était signée Jean-François Perroy alias Jef Aérosol. Le célèbre Street Artiste français y a représenté le poète antillais Aimé Césaire, fondateur du mouvement littéraire de la « négritude », concept forgé en réaction à l’oppression culturelle du système colonial français. L’oeuvre de Jef Aérosol rappelle les 213 années pendant lesquelles la France a pratiqué le sinistre commerce des esclaves.

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En janvier 2017, l’Ambassadeur et Représentant permanent de la France aux Nations Unies, François Delattre, inaugurait à l’ONU une exposition contre l’esclavage infantile. Elle était présentée par Street Art for Mankind (SAM), un collectif de graffeurs initié par Thibault et Audrey Decker pour dénoncer le travail forcé de plus de 85 millions d’enfants dans le monde. Plusieurs Street Artistes ont offert leurs contributions pour l’évènement, parmi lesquels Ador (France), Binho Ribeiro (Brésil), Bruno Smoky (Brésil), Mr Dheo (Portugal), Inkie (UK), Jo Di Bona (France), Kathrina Rupit – Kinmx (Mexique), Lyes Olivier Sidhoum (Hong Kong), Magda Love (Argentine), Mr Cenz (UK), Shalak Attack (Canada), Trek6 (États-Unis), Victor Ash (Portugal) et Yuhmi (États-Unis). Les fonds levés grâce à la vente des tableaux ont été utilisés pour lutter contre l’esclavage infantile, via la fondation de Kailash Satyarthi, Prix Nobel de la Paix en 2004 pour son engagement contre le travail des enfants.

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