Par Michel Fily, le 15 décembre 2017
Comme tous les modes d’expression artistique et peut-être plus qu’aucun autre, le graffiti n’a cessé d’évoluer et d’expérimenter de remarquables innovations, impliquant les nouvelles technologies, l’interdisciplinarité et les dispositifs interactifs.
Déjà, en 2015, la Fondation EDF présentait, à Paris, 400 m2 d’exposition de ces nouveaux usages, s’intéressant aux formes que pourrait prendre le Street Art de demain. Anamorphose (images déformées lisibles seulement depuis certains points de vue ou grâce à des miroirs), « scratching » (tags par retrait de matière), 3 D, « vidéo mapping » (le graff prend vie grâce à la projection d’animations sur le mur), « light painting » (technique qui consiste à utiliser un temps d’exposition long en déplaçant des sources de lumière) , « water light graffiti » (un mur de leds sur lequel on peint avec de l’eau), « Quick Response Codes » (nouvelle génération de codes-barres qui, une fois scannés à l’aide d’un smartphone, donnent accès à des contenus en ligne), jeux vidéos…
L’exhibition « #Streetart, l’innovation au coeur d’un mouvement » mettait à l’honneur ces nouvelles pratiques, avec les graffeurs Ron English, Shepard Fairey, JR, Zevs, Mark Jenkins, Vhils et Isaac Cordal, ou encore Slinkachu, Sweza, Rezine, Patrick Suchet et Antonin Fourneau, réinventeurs de leur discipline artistique. Tous utilisent, en plus de leurs bombes, pochoirs et pinceaux, des stylets et caméras numériques, des vidéos projecteurs, traceurs et QR codes, pour créer des œuvres hybrides qui s’exposent dans le paysage urbain comme sur les smartphones, ordinateurs et autres tablettes.
La 4ème édition du Festival de graffiti Ono’u Tahiti, en Polynésie française, a mis à l’honneur en octobre 2017 un certain nombre de ces artistes urbains novateurs dans leur discipline, à commencer par le collectif Blast Art, regroupant les trois artistes lyonnais Romain Lardanchet, Mrzl et Kalouf. Ils ont réalisé pour le festival un Graffiti « augmenté », intitulé « L’endormi ». Ce gigantesque caméléon a littéralement pris vie une fois la nuit tombée, changeant de couleurs, dévisageant le public de gauche à droite, se muant en squelette comme sous l’effet de rayons X ou encore développant une nuée d’oiseaux…
Tout cela grâce au mapping vidéo, une technologie multimédia permettant de projeter de la lumière ou des vidéos sur des volumes, de recréer des images de grande taille sur des structures en relief, tels des monuments, ou de recréer des univers à 360°. Les artistes ont eu l’idée d’appliquer cette technologie novatrice utilisée depuis plusieurs années lors de la Fête des Lumières à Lyon, pour un résultat sensationnel. Le musée du Street Art de Tahiti a également accueilli une création de graffiti augmenté en vidéo mapping. Elle a été réalisée par Mrzl et Marko93, pendant le dernier festival ONO’U. L’artiste français Marko93, originaire de Saint-Denis (93), est l’un des précurseurs de la fluorescence et du light painting dans l’histoire du graffiti. Il avait créé une fresque de tigre, éclairée à la lumière noire, pour l’inauguration du musée.
Architecte de formation vivant à Lyon, Julien Menzel aka Mrzl crée des installations lumineuses et interactives qui captivent le public. Il s’exprime avec une grande sensibilité aux formes, aux matériaux et à leur qualité plastique. En 2016, il a créé en collaboration avec Kalouf une superbe installation au musée du Street Art de Tahiti, en choisissant comme thème la pieuvre et le voyage, pour faire écho à leur découverte de Raiatea et à l’histoire du Triangle polynésien. Un graff sculpté en trois dimensions, sur lequel ont été projetées des images vidéo.
Le Mur « Illusion Cube Tahiti » est une fresque 3 D peinte par l’artiste français Astro sur la façade plate d’un immeuble de Papeete qui s’est métamorphosé en quelques jours de festival. Privilégiant le Lettrage et le Wildstyle à ses débuts, ce Street Artiste autodidacte et passionné a progressivement amené sa technique vers un art abstrait qui mêle calligraphie et formes dynamiques. En s’inspirant d’artistes tels que Hartung, Vasarely ou Mucha, Astro a su créer son propre univers en exploitant notamment la subtilité des ombres et des lumières, la force des couleurs et la perspective des profondeurs, pour créer une illusion parfaite d’objets tridimensionnels.
Une autre œuvre remarquable parmi les nombreuses fresques de l’édition 2017 d’Ono’u est celle du graffeur espagnol Okuda, qui a peint une gigantesque Tahitienne abstraite, dont le corps est recouvert de formes géométriques multicolores. Cette femme architecturale tenant un fruit lui a été inspirée par un tableau du peintre français Paul Gauguin, qui a vécu et peint sur l’ile à la fin du 19e siècle.
Les autres artistes invités du festival étaient Abuze (prix du meilleur graffeur polynésien en 2014), Cranio (Brésil), Felipe Pantone (Argentine), FinDAC (Irlande), Fitan Magee (Australie), Inkie (UK), Lady Diva et Phat1 (Nouvelle-Zélande), Heiarii Matu dit Rival (Polynésie), Sofles (Australie), Soten (Danemark)…
Pour vous inscrire et participer au prochain festival Ono’u :
- Surveillez les dates d’inscription qui devraient être en juin juillet 2018
- Téléchargez et complétez selon les instructions le règlement du concours sur le site http://tahitifestivalgraffiti.com.
- Une fois votre dossier complet constitué, retournez-le à l’adresse suivante en indiquant dans l’objet de votre mail votre nom d’artiste: tahitifestivalonou@gmail.com
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