Par Michel Fily, 7 mai 2019
Street Artiste depuis plus de 10 ans, IN THE WOUP a toujours été inspiré dans son travail par l’univers Geek et son infinie richesse. Élevé à la NES et au Club Dorothée, il a étanché sa soif d’imaginaire avec la littérature, le cinéma, les mangas, les boardgames… Ce mosaïste adepte du Pixel Street Art a œuvré en France, mais aussi au Mexique, à New York, au Canada, au Mexique, en Espagne, en Italie, au Kazakhstan, au Kirghizistan, et jusque dans l’Himalaya ! Urban Street Art Urbain l’a rencontré au festival Peinture Fraiche à Lyon.
Bonjour, peux-tu te présenter aux lecteurs ?
Je m’appelle IN THE WOUP, je fais du Street Art depuis quinze ans, j’ai débuté au pochoir avant de m’initier à la mosaïque et au Pixel Art, qui est ma discipline de prédilection aujourd’hui. J’ai beaucoup joué dans ma jeunesse sur la Nintendo et sur la super Nintendo qui ont totalement imprégné mon art. J’aime tout ce qui est très coloré. Je fais du Paper Art, des collages, des illustrations, des ballons, du pochoir et principalement de la mosaïque. Je n’ai pas fait d’études d’art, mais je dessine depuis que je suis tout petit. J’ai toujours adoré l’art plastique. J’aime travailler de mes mains et ça s’est naturellement traduit par le choix de devenir mosaïste. C’est un processus lent et laborieux.
Parfois j’envie les graffeurs qui bombent directement sur les murs pour le côté direct de leur art, alors que mon travail demande un de temps de préparation conséquent, des heures voire des jours, si on prend en compte le temps de séchage. J’achète mes carreaux, je les sous-couches avec une peinture spéciale carrelage, ensuite je prépare ma création en amont au dessin, pour définir le nombre de carreaux dont j’ai besoin par couleur. Puis je les colore, un par un, avant de les assembler et de les coller sur un filet avec une colle spéciale. Enfin je colle l’oeuvre au ciment, un mélange spécial de poudre et d’eau que je prépare moi-même. C’est un processus très agréable, mais parfois un peu frustrant, parce que la pose elle-même dure entre 30 secondes et 2 minutes, alors que tout un travail l’a précédé… Mon atelier est à Lyon, sur les pentes de la Croix Rousse. C’est un atelier partagé avec d’autres artistes qui pratiquent différentes disciplines : vitraux, cuir, etc. C’est très enrichissant de me confronter à leurs créations, ça stimule mes idées, j’en ai beaucoup que j’essaie de mettre en œuvre progressivement.
Je ne signe pas mes travaux. Je ne donne jamais mon nom et montre le moins possible mon visage. Mon art est ma signature. Je veux que les gens s’intéressent seulement à mes créations. IN THE WOUP vient du nom du dossier que j’avais créé sur mon ordinateur et où je stockais toutes les photos de mes travaux. Le dossier s’appelait WOUP et tout mon art était dedans, donc j’ai choisi IN THE WOUP pour alias. Avec le temps, ce nom a pris du sens pour moi, il représente mon univers et son évolution.
As-tu expérimenté d’autres supports que les murs?
Oui, j’ai publié un livre, il y a un an, que s’intitule « Once Upon a Geek ». C’est un petit clin d’œil à « once upon a time » (il était une fois), parce que j’adore les histoires. C’est un ouvrage entre l’univers de la science-fiction et de la Fantasy, illustré de petits dessins noir et blanc, avec plein de clins d’œil à l’univers Geek, mais aussi à la littérature, la BD, les mangas…
Quelles sont tes inspirations ?
L’univers des jeux vidéo, en particulier Super Mario World Z et d’autres « crossovers » de Mario Bross. Je crois que j’ai fait plus de 140 Marios en mosaïque, jusqu’à aujourd’hui, à chaque fois caractérisés par un univers différent.
Sur quels formats travailles-tu ?
J’utilise généralement des carreaux de 2.5 cm de côté. Pour Peinture Fraiche, j’ai fait une grande œuvre pour laquelle j’ai utilisé des carreaux de 5 par 5. Mais comme je ne suis pas millionnaire et que tout vient de ma poche, je ne peux pas pour l’instant viser plus grand… Et puis, le Street Art étant toujours illégal en France, le principe est celui de s’attarder le moins longtemps possible sur un spot. Donc, je me déguise avec un gilet et un casque de chantier et je privilégie plutôt des petits formats que je peux poser rapidement. Je suis plutôt chanceux, jusqu’à présent, parce que mes œuvres ne sont pas détruites. Au contraire, les gens nettoient autour pour qu’on les voie mieux…
Prépares-tu ton Pixel Art sur logiciel ?
Je suis assez médiocre dans ce domaine. Un ami m’a fabriqué une grille informatisée que je remplis sur le logiciel Paint et c’est très laborieux. Je passe des heures à faire des tests de couleurs, le résultat n’est pas toujours très « propre » et je m’aide de personnes qui maitrisent ces outils mieux que moi. Au départ, je dessinais sur des feuilles à petits carreaux avant de les scanner. Ça ne fait que 2 ou 3 ans que je travaille sur Paint. Je voudrais apprendre à utiliser Illustrator, mais je ne suis pas encore lancé… Les outils dont je me sers ne sont pas forcément les plus simples, mais ce sont ceux que je maitrise le mieux.
Pour le Paper Art, c’est de la découpe manuelle au scalpel. Mes collages sont basés sur des visuels que je récupère sur Internet. Je les contextualise pour faire comme si des personnages fantastiques venaient visiter notre monde. J’ai aussi pratiqué un peu le Street Flaking (le fait de réparer artistiquement les défauts du bitume : fissures, nids de poule, etc.) comme Ememem et Samsofy, qui œuvre avec des Légos. J’ai collé sur des abribus, j’ai le projet de customiser des lampes… Je suis ouvert à tout.
Quelles sont tes influences ?
Principalement, l’univers Geek, la Nintendo, mais aussi la littérature, le cinéma, les films d’animation et l’Heroic Fantasy… Je lis beaucoup de BD franco-belges, des mangas. J’aime les jeux de société qui enrichissent mon esprit logique et me donnent beaucoup de bonnes idées. J’en ai même créé deux! Un genre de Mille Bornes ou l’idée est de survivre et d’explorer de nouveaux mondes, puis un autre, que j’ai appelé Geek Master, un genre de Burger Quizz version Geek. Je ne m’occupe pas uniquement de la partie graphique, je crée tout le système de jeu, les règles, le nombre de joueurs… Parmi les artistes, je vais forcément citer Invader, le « taulier » de ma discipline, que j’adorerais rencontrer un jour.
Le Mosaic Street Art est une discipline encore peu connue du public…
Invader a ouvert la voie. Aujourd’hui, nous sommes assez nombreux dans le monde, avec chacun sa propre technique. Et notre art est de plus en plus facilement accepté et apprécié parce qu’il est plus abordable pour les gens et que son aspect est moins agressif à leurs yeux. Quelqu’un m’a dit il y a peu que, selon lui, c’est à cause du caractère « carré » de cette discipline. C’est bien délimité, les contours sont nets, ça rassure les gens. Les enfants avec leurs parents, les personnes âgées, tous s’arrêtent facilement pour prendre des photos. Mes œuvres véhiculent un univers très coloré. Et puis, tout le monde connait Mario, ça ramène les passants à leur enfance. Ça les fait sourire et leur apporte un peu de plaisir.
Quelle réaction attends-tu des personnes qui rencontrent tes œuvres dans la rue ?
Ce qui est important, c’est que le message est positif. Je fais ça parce que j’aime ça et je veux faire plaisir aux gens. Si je réussis à leur donner du bonheur, j’ai gagné mon pari. Un jour, je passais près d’un Mario que j’avais posé la veille et une petite vieille s’est arrêtée devant et à dit : « Oh, c’est Spirou ! » (rires). Elle n’avait pas reconnu mon personnage, mais ça n’avait aucune importance, parce qu’elle était contente. Je n’ai jamais eu de retour négatif sur ce que je crée. Parfois, ce sont les enfants qui expliquent les personnages à leurs parents, parce qu’ils les connaissent mieux…
Est-ce que tu te considères comme un Street Artiste ?
Oui, bien sûr, bien que je ne réfléchisse pas trop à ces choses. C’est toujours bizarre de se dire « je suis un artiste ». Mais si un artiste c’est quelqu’un qui créé des choses, alors oui, complètement. J’ai déjà fait une dizaine d’expositions depuis de que j’ai commencé. Peinture Fraiche n’est pas le premier festival auquel je participe, mais c’est clairement le plus gros. L’invitation de Cart1 m’a enchanté et c’est une grande fierté pour moi de figurer parmi tous les grands noms qui participent à ce festival. Au jour d’aujourd’hui, je ne vis pas encore de mon art, qui me coute plus cher que ce que j’en gagne, parce que mes matériaux coutent cher. Les prix en galerie sont encore bas, mais j’espère un jour pouvoir vivre de mes créations. J’ai plusieurs pistes pour le faire évoluer vers quelque chose d’encore plus abouti. Lorsque j’expose, je construis tout de A à Z : les mosaïques, bien sûr, mais aussi les cadres en bois, les accroches… Je voudrais essayer de fabriquer des œuvres détourées, pour que le support suive leurs contours. Faire des plus grands formats, qui soient très visuels. Je vends aussi des impressions, du Paper Art, mais aussi des objets décorés à des prix abordables, parce que tout le monde n’a pas les moyens de payer de grosses sommes et que je tiens à ce que tous puisse repartir avec un petit bout de mon art. Même si je n’y gagne presque rien. Par le passé j’étais assez sauvage, comme certains Street Artistes qui ne veulent pas être présents pendant les festivals. Aujourd’hui, je suis heureux de pouvoir échanger avec le public et avec les autres créateurs.
Où en es-tu de tes rêves ?
J’aimerais bien recevoir une lettre de convocation de Poudlard pour entrer en première année à l’école de sorcellerie ; j’ai essayé de postuler, mais je n’ai reçu aucune réponse jusqu’à présent (rires). Non, sérieusement, je viens d’être papa, c’est un évènement merveilleux qui vient de m’arriver. Et beaucoup de bonnes choses l’ont accompagné. Je vais peut-être signer pour faire une grande façade pour une entreprise lyonnaise, un Mario immense qui envoie du lourd… J’aimerais bien voyager, en Asie, en Amérique du Nord, au Japon (je m’intéresse beaucoup à l’histoire de ce pays).
Si j’étais le génie de la lampe d’Aladin et que tu pouvais exhausser trois vœux, lesquels seraient-ils ?
Ça fait des années que j’attends cette question ! Mon premier vœu serait de pouvoir parler tous les langages, celui des plantes, ceux de tous les hommes et de tous les animaux. Mon second vœu serait d’être capable de nettoyer toute la Terre, de la pollution qui la détruit. Et aussi des méchants, si ce n’est pas trop demander (rires). Enfin, mon dernier vœu serait de pouvoir posséder à volonté les pouvoirs de tous les héros que j’aime, juste en pensant à eux. Plus sérieusement, J’aimerais, comme tous les Street Artistes, pouvoir créer partout dans le monde, en commençant par New York, puis Tokyo, dans le quartier des jeux vidéo, si emblématique.
Y a-t-il une question que je n’ai pas posée et à laquelle tu aimerais répondre ?
Je voudrais juste parler de la notion de transmission. Lorsque des jeunes me contactent sur Messenger pour que je leur explique mes techniques, je suis ravi. Je suis pour le partage de l’information et je vois cela comme ma contribution à faire une nouvelle génération de Street Artistes. Dans ma jeunesse, j’étais animateur pour enfants et je leur ai appris à faire des pochoirs. Plusieurs années plus tard, j’ai appris que l’un d’entre eux était devenu pochoiriste de haut niveau. Je suis heureux d’avoir allumé cette petite étincelle en lui. J’aime le côté fraternel du milieu urbain, nous sommes une famille.
www.facebook.com/In-the-Woup-713557535426431/?fref=ts
Festival Peinture Fraiche, 10 jours, 70 artistes, 12 pays. Du 3 au 12 mai 2019, à la Halle Debourg, 45-47 Avenue Debourg, 69007 Lyon (Métro,Tramway, arrêt Debourg).
https://www.peinturefraichefestival.fr
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